Ou la nef incendiée de ma mémoire....
Le passé se cambre, comme pour soutenir le cintre de la mémoire.
Voûte tendue des souvenirs, léchée par l’ombre tremblante de la lumière du jour qui
filtre au travers des vitraux du désir, flammèches de lueurs qui donnent encore quelques
frissons aux pierres humides, aux dalles froides, au chemin de croix déjà parcouru.
Je suis dans la pénombre voûtée de ma mémoire.
La peau nue sur les murs noirs.
La peau nue sur l’usure de mes ans, traversée par une sorte de langueur de crucifié.
J’habite une église désertée, sans procession, sans ostension, les saints de marbres
gisent absents, le geste vain, le regard vide de compassion.
Et sur l’autel, nul calice, nul livre sacré, nulle parole d’évangile, nul cierge, hormis un
silence immaculé et austère, imperturbable, et insensible.
Il est de ces chapelles abandonnées par les dieux, où seul le temps y pénètre, et les
seules prières qu’on entend sont murmurées par le vent,
Et les seuls murmures qui s’élèvent sont les larmes qui suintent le long des vitraux.
Chapelle de nuit et d’orage.
Chapelle d’oubli. Ni portes, ni pardon.
L’expiation est un long pèlerinage.
Mais je sais des arcs-en-ciel qui perceront ces murs.
Je sais des océans dans les plis même de la pierre.
Oui, je sais des saintes.
Des saintes résolues à la peau de passion, à la chair de cantiques.
J’entends pousser un arbre au transept de mon silence et couler un long fleuve dans
ma nef patiente.
Je sais un incendie qui couve.
Et je sais mon sang quand il brûle chacun de mes mots…
Je sais toutes ces choses quand elles arrivent au bruit de galop, je les reconnais aux
frissons des étoiles et à l’effarement des cieux.