Gros plan sur les fessiers des deux soeurs déchargeant le coffre de la Ford Granada, plongée vertigineuse sur le décolleté avantageux de Penélope Cruz en train de faire la vaisselle, vision à la dérobée d'un déshabillage adolescent : on ne peut pas vraiment dire que Pedro Almodovar n'aime les femmes que pour leurs qualités morales. Mais, comme souvent dans ses films, elles sont le coeur et l'âme de l'intrigue. On ne sait pas ce que son père ou ses pairs ont fait à Pedro pour qu'il trouve si peu de compassion pour les mâles, ici réduits au rang de créatures égoïstes et insignifiantes, mais le fait est qu'il a la dent dure.
Raimunda, superbement incarnée par une Penélope Cruz voluptueuse, bouillonnante, bouleversante, a perdu ses parents sans avoir réussi à régler ses comptes avec eux. Quand son existence bascule une nouvelle fois dans le drame, le passé ressurgit pour bousculer cette vie fondée sur le non-dit. Entourée de sa fille Paula et de sa soeur Sole, épaulée par sa voisine d'enfance, la bienveillante Agustina, elle va devoir revenir ("volver") vers cette mère fantomatique et honnie.
Portrait de femme en rupture avec son milieu, qui doit briser le joug social pour enfin être elle-même. En un sens, Pedro Almodovar fait toujours le même film, social, cruel, réalistico-satirique. L'héroïne doit trouver sa voie au milieu d'antagonismes divers : jeunesse contre vieillesse, masculinité contre féminité, ville contre campagne. Un débat multiforme dont la solution s'appelle tout simplement... la vie.
Ghost Writer
"Volver"
de Pedro Almodovar
(2006)